Derrière la responsabilité des policiers accusés, souvent présentés comme des cas déviants, Jérémie Gauthier, sociologue à l’Institut de recherche interdisciplinaire sur les enjeux sociaux (IRIS-EHESS) et chercheur associé au centre Marc-Bloch, à Berlin, s’interroge sur la responsabilité de l’institution policière tout entière.

Derrière l’affaire Benalla, la question des violences policières
Selon des chercheurs, les violences policières, banalisées, mettent en lumière les problèmes structurels de la police française et invitent à repenser le système en profondeur.
LE MONDE - 28.07.2018 | Par Nina Jackowski

Derrière la responsabilité des policiers accusés, souvent présentés comme des cas déviants, Jérémie Gauthier, sociologue à l’Institut de recherche interdisciplinaire sur les enjeux sociaux (IRIS-EHESS) et chercheur associé au centre Marc-Bloch, à Berlin, s’interroge sur la responsabilité de l’institution policière tout entière :

« Une réflexion devrait être menée en France sur le sens du mandat policier. Il apparaît nécessaire de prendre en compte les causes structurelles derrière le déchaînement des violences policières individuelles. »


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Afin de les appuyer dans leur mission, les gardiens de la paix ont été dotés d’armes non létales de plus en plus violentes : Flash Ball, Taser et grenade de désencerclement. Au moment d’évacuer la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, en avril, dix mille grenades lacrymogènes ont été tirées en dix jours. Une utilisation massive qui pose question.

« Ironie de l’histoire, relève Christian Mouhanna, ces armes ont été introduites aux Etats-Unis pour limiter le recours à l’arme à feu. En France, où les policiers en faisaient peu usage, cela a créé une incitation indirecte à être plus violent. »


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Dans ce rapport de force historique, la police se caractérise comme une institution en perpétuelle quête d’autonomie, face au pouvoir étatique s’évertuant à en faire son propre instrument. Jérémie Gauthier note que l’instrumentalisation de la question de l’insécurité à des fins électorales a créé une situation paradoxale :

« Le caractère discriminatoire de certains contrôles d’identité, qui est désormais prouvé, ainsi que les violences, traduisent en France un déficit de démocratie lié à l’action policière. Les affaires Théo L. et Traoré en sont des exemples. Pourtant, malgré des mobilisations croissantes, les autorités campent sur une position de déni. »

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